On sait qu’un créancier professionnel, notamment une banque, ne peut pas se prévaloir d’un cautionnement conclu par une personne physique (par exemple, un dirigeant pour garantir un prêt contracté par sa société) dont l’engagement était, lorsqu’il a été souscrit, manifestement disproportionné à ses biens et à ses revenus. À moins que le patrimoine de cette personne ne lui permette, au moment où la banque lui demande de payer en lieu et place du débiteur, de faire face à son obligation.
À noter : il s’agit donc d’un moyen fréquemment invoqué par les cautions pour tenter d’échapper à leur obligation lorsqu’elles sont poursuivies par leur banque.
Prise en compte de tous les biens sans distinction
Mais une question se pose : lorsqu’une personne, mariée sous le régime de la communauté, s’est portée caution sans l’accord de son conjoint, faut-il prendre en compte, pour évaluer le caractère manifestement disproportionné de son engagement, uniquement ses revenus et ses biens propres ou aussi les biens qu’elle possède en commun avec son conjoint ?
La Cour de cassation a tranché en faveur de la deuxième proposition : pour elle, la disproportion manifeste de l’engagement de la personne qui s’est portée caution doit s’apprécier par rapport à tous ses biens, sans distinction, donc aussi par rapport aux biens communs.
Ainsi, dans cette affaire, les juges ont décidé qu’un bien immobilier appartenant en commun aux deux époux devait être pris en considération pour apprécier si l’engagement de caution pris par l’un d’eux pour garantir les dettes d’une société envers un fournisseur était ou non disproportionné. Et ce, quand bien même ce bien ne pouvait de toutes façons pas être saisi par le fournisseur puisque l’autre époux n’avait pas donné son consentement au cautionnement.
Rappel : lorsqu’une personne mariée sous le régime de la communauté se porte caution, elle n’engage, en principe, que ses biens propres et ses revenus. Les biens appartenant en commun au couple ne sont engagés par ce cautionnement que si le conjoint de l’intéressé y a expressément consenti. Sachant que dans ce cas, les biens propres du conjoint demeurent à l’abri des poursuites du créancier.
Cassation commerciale, 15 novembre 2017, n° 16-10504
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